ECONOMIE
Pays-Bas : Shell condamnée en appel à verser des indemnités à des fermiers nigérians

La justice néerlandaise a condamné vendredi en appel Shell à verser des indemnisations dans une affaire intentée par quatre fermiers nigérians, qui accusent le géant pétrolier de fuites de pétrole ayant détruit trois villages dans le delta du Niger.
«Le tribunal a jugé que Shell Nigeria était responsable des dommages résultant des déversements», a déclaré un juge lors d’une audience à La Haye, ajoutant que la maison-mère Royal Dutch Shell est également tenue d’équiper les oléoducs concernés «d’un système de détection des fuites» afin de prévenir d’autres dommages environnementaux.
Avec AFP

ECONOMIE
Le patron de l’OMS veut des mesures concrètes pour augmenter la production de vaccins

Le patron de l’OMS s’est livré à un vibrant plaidoyer ce vendredi en faveur de mesures concrètes pour augmenter drastiquement la production de vaccins contre le Covid-19, au-delà de l’appel du Conseil de sécurité à un accès équitable à l’immunisation.
Tedros Adhanom Ghebreyesus a jeté tout son poids dans un débat aussi controversé que complexe et technique : lever provisoirement les brevets qui protègent les intérêts des inventeurs des vaccins contre le Covid pour résorber la pénurie et aider à éradiquer une pandémie qui en un peu plus d’un an a déjà fait 2,5 millions de morts.
«Le vote pour l’équité en matière de vaccins est important et nous apprécions cela», a réagi le directeur général au cours de sa conférence de presse bi-hebdomadaire à Genève, peu après l’adoption à l’unanimité de la résolution à New York.
Débat houleux
Mais il a fait comprendre que ce geste était loin d’être suffisant : «des mesures concrètes doivent être prises comme renoncer à la propriété intellectuelle sur les brevets pour augmenter la production, la couverture du vaccin et se débarrasser de ce virus dès que possible».
Le débat sur la levée provisoire de la propriété intellectuelle agite l’Organisation mondiale du commerce depuis octobre. Avancée par l’Inde et l’Afrique du Sud, la proposition est fermement combattue par l’industrie pharmaceutique appuyée par l’Union européenne, les Etats-Unis et la Suisse et d’autres pays riches.
Les opposants affirment notamment que cela découragerait à terme l’investissement dans la recherche et le développement de nouveaux médicaments et jugent que les laboratoires qui ont mis au point les vaccins sont aussi les mieux placés pour les produire dans les quantités requises. La proposition sera débattue au Conseil général de l’OMC lundi et mardi prochains.
Le docteur Tedros ne comprend pas les réticences et estime que les accords de l’OMC autorisent cette procédure en cas de force majeure. «Nous voyons un manque de coopération et même une forte résistance et pour être tout à fait honnête je n’arrive pas à comprendre ça, parce que cette pandémie est sans précédent. Le virus a pris le monde en otage», s’est-il désolé.
Pour lui «la suspension des brevets devrait être prise au sérieux et le Conseil de sécurité peut le faire s’il y a une volonté politique», a-t-il martelé.
vaccinal
Pour le directeur général il faut suspendre les brevets, encourager le transfert de technologie mais aussi pousser les groupes pharmaceutiques à mettre à disposition de leurs concurrents leurs capacités de production. C’est le seul moyen de répondre à un autre phénomène qui prive les pays les plus défavorisés d’accès à l’immunisation : le nationalisme vaccinal.
Sous la pression de leur population, les gouvernements des pays qui en ont les moyens achètent les doses encore rares pour vacciner le plus de monde possible et pas seulement les catégories prioritaires. Cela ne fait qu’aggraver les problèmes d’approvisionnement des pays moins bien lotis.
Quand la présidente de la Commission européenne promet de vacciner 70% de la population de l’UE à l’été ou quand la nouvelle administration de Joe Biden promet de vacciner tous les Américains au plus vite, cela fait douter de l’appel du Conseil de sécurité à l’accès équitable.
Le système Covax – mis en place par l’OMS, l’Alliance pour les vaccins (Gavi) et d’autres partenaires – pour éviter justement que quelques-uns n’accaparent l’essentiel des doses disponibles en souffre, et particulièrement son volet destiné à fournir les 92 pays les plus défavorisés qui y ont souscrit.
«Ces actions sapent Covax et privent les personnels soignants et les personnes vulnérables dans le monde entier de vaccins qui peuvent leur sauver la vie», a dénoncé le directeur général.
Bruce Aylward, un de ses conseillers spéciaux, a souligné que «certains pays continuent de tenter de nouer des accords qui vont mettre en danger l’approvisionnement du système Covax, sans l’ombre d’un doute». Y compris le Serum Institute of India, qui doit fournir l’essentiel des vaccins distribués par Covax au premier semestre de cette année.
Avec AFP
ECONOMIE
Somalie : à Mogadiscio, une jeune femme défie les stéréotypes au volant de son taxi

Seuls 3 des 2 000 taxis de l’entreprise Rikaab sont conduits par des femmes dans la capitale somalienne, dans un pays plongé dans le chaos depuis 1991.
Divorcée, 19 ans. Elle conduit un taxi dans l’un des pays les plus dangereux et conservateurs au monde. En prenant chaque jour le volant pour faire vivre sa famille, Asha Mohamed défie les conventions en Somalie. Depuis un an, la jeune femme sillonne les rues de la capitale somalienne Mogadiscio dans son taxi blanc.
Elle a choisi cette carrière autant par passion que par nécessité, après avoir divorcé de son époux à qui elle avait été mariée à l’âge de 16 ans. Cette démarche, rare et mal perçue dans une société somalienne dominée par un islam conservateur et au fonctionnement clanique et patriarcal, s’est doublée d’un autre défi : trouver un emploi pour subvenir aux besoins de ses deux enfants et de sa mère, chez qui elle vit désormais.
«Passionnée par les voitures»
Pour Asha, le métier de taxi, bien qu’habituellement réservé aux hommes et particulièrement exposé dans une ville réputée pour son insécurité, a semblé presque naturel. «Dans mon enfance, j’étais passionnée par les voitures, je voulais devenir pilote un jour», raconte la jeune femme, qui joue parfois à des jeux vidéo de voitures sur son téléphone.
«Je ne pensais pas à chauffeure de taxi au départ. Mais quand la société Rikaab Taxi a été créée l’année dernière, j’ai décidé de les rejoindre, surtout qu’il n’y avait aucune femme à l’époque. J’ai vu une belle opportunité», explique-t-elle.
Le métier comporte d’énormes risques : la Somalie est plongée dans le chaos depuis la chute du régime militaire du président Siad Barré en 1991. Le pays a d’abord été le théâtre d’une guerre des clans, avant qu’éclate l’insurrection des islamistes radicaux chabab.
A Mogadiscio, les carrefours fréquentés et les checkpoints des forces de sécurité sont régulièrement la cible d’attentats. Le dernier en date, le 13 février, une attaque à la voiture piégée revendiquée par les chabab, près d’un point de contrôle situé sur l’un des grands axes de la ville, a tué au moins trois civils et en a blessé huit autres.
«Le nombre de femmes chauffeures de taxis était très faible à cause de l’insécurité, mais depuis que nous avons lancé notre entreprise il y a un an, on recrute de plus en plus de femmes», assure Ilham Abdullahi Ali, la responsable des finances de Rikaab Taxi. Toutefois, seuls trois des 2 000 taxis de l’entreprise dans la capitale somalienne sont conduits par des femmes.
Ponctualité et prudence
Les clients sont souvent déroutés en voyant le visage rond et délicatement maquillé d’Asha derrière le volant. Etudiant à l’université Salaam, Sadiq Dahir Mohamed avoue avoir été surpris, voire gêné, lorsqu’elle l’a pris en charge pour une course la première fois. Mais aujourd’hui, son regard a changé.
«Même si, habituellement, c’est un travail pour des hommes, aujourd’hui je préfère avoir une femme, elles sont toujours à l’heure et elles conduisent beaucoup plus prudemment», sourit-il.
Avec un salaire pouvant atteindre 40 dollars par jour, Asha Mohamed parvient à faire vivre seule sa famille, en espérant que son cas puisse contribuer à faire un peu évoluer les mentalités dans son pays.
Peu de données récentes sont disponibles sur la situation des femmes en Somalie. En 2012, le pays figurait parmi les quatre moins bien classés au monde dans l’Indice d’inégalité de genres (IIG) du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). L’agence onusienne y pointait une situation «alarmante» pour les droits des femmes.
«Les femmes souffrent d’une exclusion et d’une inégalité sévères dans tous les domaines de l’indice [santé, emploi…]» et les «lois traditionnelles, utilisées à la place d’un système judiciaire d’Etat, sont hautement discriminatoires envers les femmes», soulignait ce rapport.
«Les filles somaliennes sont données en mariage très jeunes et les violences contre les filles et les femmes sont très répandues», ajoutait-il, rappelant qu’on estime que 98 % des femmes en Somalie ont subi des mutilations génitales.
Avec AFP